Un projet d’institut de médecine personnalisée des maladies psychiatriques

Un site utilisant Réseau AP-HP

Hôpitaux Universitaires Henri Mondor

Un projet d’institut de médecine personnalisée des maladies psychiatriques

Un projet d’institut de médecine personnalisée des maladies psychiatriques

e

La Fondation FondaMental a présenté son projet d’institut de médecine personnalisée pour les maladies psychiatriques, mercredi 14 décembre, visant à mettre en place des partenariats public/privé pour stimuler la recherche et l’innovation, à l’approche de son 10ème anniversaire.

La fondation a été créée en 2007 en réponse à un appel d’offres du ministère délégué à l’enseignement supérieur et de la recherche sur les réseaux thématiques de recherche et de soins (RTRS) avec quatre missions: soigner les maladies psychiatriques sévères, comprendre, former et informer, rappelle sa directrice, le Pr Marion Leboyer, qui exerce au sein des Hôpitaux universitaires Henri-Mondor à Créteil (Val-de-Marne, AP-HP), dans un entretien mardi à l’APM.

En 10 ans, le réseau de coopération scientifique a participé à la structuration de la recherche en psychiatrie en France, « avec une augmentation constante du nombre de laboratoires participant, de 23 en 2007 à aujourd’hui 74, de toutes origines (Inserm, CNRS, CEA, Institut Pasteur…) et dans tous les domaines ».

« On a stimulé la recherche autant qu’on a pu, pas autant qu’on a voulu. La psychiatrie reste le parent pauvre de la recherche en France. » Une étude menée en 2008 par les équipes de la fondation a montré qu’elle ne représentait que 2% de la recherche en santé alors que le coût total des maladies mentales était en 2007 d’environ 108 milliards d’euros.

En lançant à présent ce projet d’Institut FondaMental sur la médecine personnalisée des maladies psychiatriques, la fondation vise à « soutenir l’innovation dans le cadre de partenariats public/privé, comme ce qui existe avec la médecine personnalisée dans le cancer », explique le Pr Leboyer.

Il s’agit de développer de nouveaux outils, notamment à l’aide des data et des objets connectés, pour permettre « une évaluation clinique, biologique et radiologique très poussée des patients et déterminer la signature clinico-biologique de sous-groupes homogènes ».

A terme, il sera possible de « proposer une stratégie thérapeutique personnalisée associant à la fois des thérapies ciblées, des psychothérapies et des conseils d’hygiène de vie ».
L’institut vise aussi à donner « plus de visibilité à la recherche en psychiatrie » pour à la fois réengager l’industrie du médicament et attirer des industriels d’autres secteurs, engagés dans l’analyse des big data, l’e-santé, les objets connectés, les biomarqueurs…, poursuit la psychiatre.

« C’est un projet ambitieux qui réunira sur un même site, à proximité à la fois de l’université Paris-Est Créteil Val-de-Marne (Upec) et d’Henri-Mondor, des équipes pluridisciplinaires médicales et de recherche, des secteurs public et privé, mais aussi des associations de patients. »

Porté par la fondation, le projet bénéficie du soutien d’acteurs publics comme l’hôpital Henri-Mondor à Créteil et l’Assistance publique-hôpitaux de Paris (AP-HP), ainsi que l’Upec, qui met à disposition un terrain pour la construction d’un futur bâtiment.

La fondation doit trouver des partenaires privés et des mécènes pour financer la construction. Des discussions ont débuté. Pour l’heure, la fondation élabore le programme scientifique de l’institut, qui permettra notamment de déterminer les besoins en équipements et chiffrer le projet en 2017, précise sa directrice.

« Il y a urgence ! Les maladies psychiatriques représentent un défi majeur du XXIème siècle du fait de leur coût humain, sociétal et économique. Sans soutien à la recherche et à l’innovation, elles seront la première cause mondiale de handicap à l’horizon 2020, selon les prévisions de l’OMS [Organisation mondiale de la santé]. »

Parmi les personnalités présentes pour la présentation du projet, le secrétaire d’Etat à l’enseignement supérieur et à la recherche, Thierry Mandon, a salué le dynamisme de la fondation et estimé qu’il fallait absolument soutenir la recherche en psychiatrie, a rapporté la Fondation FondaMental sur son fil Twitter.

a

Les centres experts, un modèle qui ne peut s’étendre par manque de moyens

Revenant sur le bilan des 10 ans de la fondation, le Pr Leboyer souligne qu' »en répondant aux appels à projets nationaux et européens, en faisant appel à des financements privés, on a pu créer deux chaires d’excellence, l’une sur le suicide et l’autre sur l’autisme, et financer 60 postes et bourses de post-doc et de master ».

Au total, les équipes impliquées dans le réseau ont publié quelque 350 articles, sur des marqueurs biologiques, la piste de l’immunopsychiatrie, l’imagerie cérébrale, les interactions entre facteurs génétiques et environnement…
La fondation a participé également à une nouvelle organisation des soins avec la mise en place de quatre réseaux de 37 centres experts sur le trouble bipolaire, la schizophrénie, l’autisme de haut niveau ou syndrome d’Asperger et la dépression résistante.

« Près de 10.000 patients au total ont été évalués, diagnostiqués et suivis. On a pu ainsi constituer une base de données cliniques et des biobanques. »

« Cependant, le manque de dotation spécifique induit des délais d’attente importants, jusqu’à trois ans pour l’accès au réseau pour Asperger. Pourtant on a montré l’importance du bilan diagnostique et son impact sur la prise en charge dans ces maladies psychiatriques. Il permet de dépister les comorbidités médicales qui sont plus fréquentes qu’en population générale, en particulier le syndrome métabolique, mais souvent non diagnostiquées et donc non traitées. »

« Cela permet de réorienter les patients et d’améliorer l’observance thérapeutique, avec pour conséquence une baisse de 50% de la durée d’hospitalisation en deux ans, ce qui génère aussi des économies pour le système de soins », fait encore valoir la psychiatre.

Elle ajoute que des professionnels de santé demandent à ce que le modèle des centres experts soit étendu à d’autres maladies, notamment les troubles obsessionnels compulsifs (TOC), l’hyperactivité ou le suicide, « mais nous n’avons pas les moyens ».

Dans le cadre de sa mission d’information au grand public et aux décideurs, la fondation a diffusé des résultats d’études et d’enquêtes sur la situation de la recherche en psychiatrie en France, lancé des appels pour que la situation s’améliore  « mais on a l’impression de ne pas être entendu », déplore le Pr Leboyer.

Le gouvernement a mis en place deux Plans psychiatrie et santé mentale, 2005-08 et 2011-15. Dans ses rapports d’évaluation, le Haut conseil de la santé publique (HCSP) avait estimé que le premier avait eu un « effet d’impulsion limité » sur la recherche et saluait alors la création de la fondation FondaMental, sans lien direct avec le plan, « outil majeur pour la recherche dans l’ensemble du champ de la santé mentale », note-t-on. Concernant le second plan, il recommandait un soutien « fort et fiable » à la recherche.
(Source APM du 14 décembre 2016)

Thierry Mandon

Thierry Mandon

Pr Marion Leboyer

Pr Marion Leboyer